Inscription au registre et COVID-19 : Mobilisation des acteurs socio-économiques pour relancer le Québec
Depuis le début de la pandémie de la COVID-19 au Québec, plusieurs communications d’influence s’exercent auprès des institutions publiques. Bon nombre d’acteurs socio-économiques se sont mobilisés. Ils ont fait valoir leurs besoins et offres de service ainsi que défendu leurs positions auprès des décideurs publics en lien avec les mesures sanitaires ou la continuité de leurs activités. Du 1er janvier au 31 octobre 2020, nous avons dénombré 475 mandats inscrits au registre des lobbyistes, tous types de lobbyistes confondus, qui concernent directement la COVID-19. En comparaison, le registre des lobbyistes fédéral en compte 632 pour la même période. Aperçu des activités de lobbyisme en temps de pandémie.
Institutions gouvernementales et municipales les plus sollicitées
À la lumière des inscriptions au registre, nous avons répertorié 1 006 institutions ayant fait l’objet d’activités de lobbyisme en lien avec la COVID-19. De ce nombre, nous avons relevé les cinq institutions gouvernementales les plus sollicitées dans le cadre d’activités de lobbyisme.
Au second rang, le ministère des Finances (MFQ) fait l’objet de 331 mandats inscrits au registre pour la même période. En troisième position, le ministère du Conseil exécutif(MCE) dénombre 269 mandats. Mentionnons par ailleurs que le premier ministre (ministère du Conseil exécutif) a été visé directement dans 246 mandats portés au registre. Viennent ensuite, aux quatrième et cinquième rangs, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) avec 268 mandats et le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) avec 247 mandats.
Autre fait intéressant : les élus et fonctionnaires des villes les plus populeuses sont aussi considérablement sollicités en lien avec la COVID-19. D’abord, la Ville de Montréal compte 216 mandats inscrits au registre, arrivant ainsi en 9e position des institutions publiques[1] les plus sollicitées dans le cadre d’activités de lobbyisme. Suivent la Ville de Québec (142 mandats, 15e rang), la Ville de Laval (119 mandats, 18e rang), la Ville de Longueuil (111 mandats, 20e rang) et la Ville de Gatineau (93 mandats, 26e rang).
Quelles décisions les entreprises, organisations et leurs représentants tentent-ils majoritairement d’influencer?
C’est au chapitre des décisions touchant les lois, règlements, résolutions, orientations, programmes ou plans d’action qu’ont été exercées le plus de communications d’influence, avec un total de 376 mentions portées dans les mandats concernant la COVID-19. Ces activités de lobbyisme ont aussi tenté d’influencer les décisions entourant l’attribution d’un contrat, autrement que dans le cadre d’un appel d’offres public, d’une subvention ou d’un autre avantage pécuniaire. Ainsi, 115 mentions au registre font référence à cette série de décisions. Enfin, on retrouve 13 occurrences relativesà l’obtention de permis, licences, certificats et autorisations diverses.
Précisons que certains mandats inscrits peuvent inclure plusieurs types de décisions. Par exemple, un mandat peut viser à la fois d’influencer une orientation en matière de politique d’achat ainsi que l’octroi éventuel d’un contrat en vertu de cette politique. Cela explique le nombre plus élevé de décisions identifiées (504) par rapport au nombre total de mandats inscrits au registre (475) en lien avec la COVID-19.
Par ailleurs, les champs d’intérêt identifiés dans les mandats (qui peuvent aussi être nombreux) sont également révélateurs de ce qui anime le plus les entreprises, organisations et leurs représentants dans les démarches effectuées auprès des pouvoirs publics depuis le début de la pandémie. Le tableau suivant présente les cinq champs d’intérêt les plus fréquemment identifiés dans l’ensemble des mandats concernant la COVID-19, ainsi que le nombre de mandats en faisant mention.
Champ d’intérêt | Nombre de mentions dans divers mandats |
Développement économique ou régional | 325 |
Santé | 279 |
Affaires municipales | 263 |
Fiscalité, finances, institutions financières et valeurs mobilières | 239 |
Emploi, formation et travail | 238 |
Croissance de l’intensité des activités de lobbyisme : trois phases et tendances
L’analyse des mandats au registre des lobbyistes permet de dégager trois phases et tendances entourant les inscriptions relatives à la gestion de la COVID-19, entre le 1er janvier et le 31 octobre 2020. Les mandats inscrits au registre des lobbyistes découlent notamment de l’évolution du contexte pandémique au Québec. Précisons ici qu’il s’agit de constats généraux, faits à la lumière d’une analyse qualitative permettant au Commissaire de dégager des tendances.
Phase 1
D’abord, en mars 2020, moment où le décret 177-2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire québécois a été signé par le gouvernement, on constate que les entreprises et organisations font appel au gouvernement pour obtenir des contrats ou davantage de ressources financières pour faire face à la crise qui se dessine peu à peu.
Phase 2
À partir du mois d’avril, plusieurs mandats font référence au décret 223-2020 concernant l’ordonnance de mesures visant à protéger la santé de la population dans la situation de pandémie de la COVID-19 . Par ailleurs, notons que du mois d’avril au mois de juin 2020, les activités de lobbyisme liées à la COVID-19 ont représenté 6,2 % et 7,5 % de tous les mandats actifs au registre.
Plusieurs lobbyistes-conseils, lobbyistes d’entreprise et lobbyistes d’organisation font alors des représentations pour que les activités économiques de leur entreprise ou client soient reconnues comme « service essentiel » au sens des décrets adoptés. Parmi les secteurs économiques les plus actifs, mentionnons, par exemple, ceux de la construction, de l’immobilier, de la restauration et de l’industrie du livre. Dans les grandes lignes, les mandats font état de la volonté de maintenir les activités et de réduire le fardeau financier des entreprises et visent souvent à influencer l’attribution d’un contrat, de subventions ou d’autres avantages pécuniaires. Certaines représentations demandent notamment le report de mesures législatives, réglementaires ou fiscales leur apparaissant contraignantes. Parallèlement, les entreprises et organisations touchant de près ou de loin le domaine de la santé ou les services à l’intention des personnes vulnérables disent souhaiter établir des partenariats avec le réseau public de la santé et des services sociaux et tentent aussi d’influencer l’attribution de contrats divers.
Phase 3
Les mesures de relance économique amorcées en juin 2020 par le gouvernement ont donné lieu à plusieurs mandats axés sur la volonté des entreprises et organisations de se positionner comme des partenaires de l’État. Fait à souligner : l’intensité des représentations d’intérêts relatives à la COVID-19 est plus élevée en septembre (13,4 %) et en octobre 2020 (12,1 %) qu’au cours des cinq premiers mois de la pandémie. Une nette augmentation, en comparaison au mois d’avril (7,5 %) ou au mois de juillet (8,6 %). La reprise de certains secteurs d’activités, qui avaient été considérablement ralentis par les mesures de confinement du printemps, pourrait en partie expliquer cette croissance à l’automne.
Dans le contexte des mesures de relance économique, les activités de lobbyisme ont notamment visé des décisions touchant des lois, règlements, orientations, programmes ou plans d’action. Plusieurs mandats précisent la volonté de créer des partenariats avec l’État, et notamment en matière de formation de la main-d’œuvre, d’aide aux enfants ayant des troubles d’apprentissage ou encore de services en ligne.
Inscription au registre : incontournable pour tenter d’influencer les décideurs publics
Les enjeux relatifs à la gestion gouvernementale de la pandémie constituent des sujets qui intéressent particulièrement les entreprises, les organisations et leurs représentants dans le cadre de leurs communications auprès des décideurs publics. Même si les capacités de recherche de l’actuel registre des lobbyistes sont limitées, en consultant le registre avec des champs d’intérêt ou des mots-clés précis, les citoyens peuvent néanmoins avoir un bon aperçu des communications d’influence qui ont cours auprès des institutions publiques et, à leur tour, intervenir dans le débat.
Pour sa part, le Commissaire a été et demeure à l’affût des activités de lobbyisme exercées dans certains contextes particuliers, comme la gestion de la pandémie, et assure notamment une veille médiatique. Cette veille mène à des activités de surveillance et, dans certains cas, à des interventions afin d’assurer la conformité des mandats inscrits au registre.
Pour connaître les activités de lobbyisme inscrites au registre en lien avec la pandémie, les utilisateurs peuvent sélectionner « recherche avancée » et entrer les mots-clés « COVID-19 », « pandémie » ou « coronavirus » : .
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[1] Toutes institutions publiques confondues (parlementaires, gouvernementales et municipales)