Transparence : qui doit donner l’exemple?

Le 24 octobre dernier, six anciens premiers ministres du Québec ont publié une lettre ouverte dans laquelle ils font part de leurs préoccupations quant au projet de loi no 15, « motivés par la conviction qu’aucun enjeu n’est plus important pour les Québécoises et les Québécois que l’accès à des services de santé et des services sociaux de qualité ».

Le caractère public de cette lettre lui confère une aura de transparence. Mais est-ce vraiment le cas? Son contenu correspond-il aux attentes minimales de transparence fixées par l’État québécois au bénéfice de ses citoyens lorsque l’on tente d’influencer la décision d’une institution publique, notamment en matière d’orientations législatives?

Si un lobbyiste avait transmis une telle lettre au ministre de la Santé, il aurait été tenu de respecter les exigences de divulgation prévues par la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme (LTEML). Ainsi, le citoyen aurait eu accès à une multitude d’informations pour juger du bien-fondé de cette intervention, incluant entre autres l’identité du client ou des bénéficiaires de l’intervention, les personnes qui leur sont liées, les entreprises ou organisations qui leur sont rattachées ainsi que les véritables objectifs de la communication.

Ce lobbyiste devrait aussi respecter le Code de déontologie des lobbyistes et ainsi mener ses activités en tenant compte de l’intérêt public et en respectant le droit du public à une information exacte, notamment par la divulgation de renseignements complets et de l’identité des personnes dont il représente les intérêts.

Les attentes des citoyens envers les institutions sont grandes. Pour maintenir leur confiance, en 2023, la transparence partielle n’est pas suffisante. Malheureusement, il existe de nombreuses failles dans la LTEML, notamment l’exclusion, trop souvent invoquée, des communications d’influence faites bénévolement.

Que l’on soit lobbyiste ou non, ce qui importe vraiment est que le citoyen ait la certitude que son droit à l’information et à la pleine transparence a été respecté. L’État a déterminé les exigences minimales de ce droit en adoptant la LTEML. Avec égards, justement parce que leur opinion a une influence très importante sur celle des citoyens, nos élus et dirigeants devraient se faire un devoir de soutenir et promouvoir la pleine transparence des communications d’influence, en déployant tous les efforts requis pour la mettre en œuvre.

Le public est en droit de s’attendre que ses élus et dirigeants, anciens, actuels et futurs, montrent l’exemple.

– Me Jean-François Routhier, commissaire au lobbyisme du Québec

Back To Top